Sa Majesté le roi d’Espagne, Don Felipe VI
Sa Majesté le roi d’Espagne, Don Felipe VI
Il y a 25 ans, la ville de Barcelone, historiquement tournée vers la Méditerranée, a été le théâtre d’un événement que l’on peut qualifier d’historique. Je fais référence à la Conférence de Barcelone, qui a réuni les 15 États membres de l’UE d’alors avec leurs partenaires méditerranéens et lancé le « Processus de Barcelone », institutionnalisé des années plus tard dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée.
Le caractère historique de cette occasion a été donné non seulement par le nombre et la diversité de ses protagonistes, mais aussi par l’esprit d’harmonie et la vision d’un avenir commun qui l’a rendu possible. Cela a permis de convenir d’une déclaration politique ambitieuse et d’un programme de travail très détaillé pour faire de la Méditerranée un espace de paix et de stabilité, de prospérité partagée, de respect et d’échanges mutuellement enrichissants dans les domaines humain et culturel.
Lorsqu’il s’agit de faire le point sur le passé et de faire face résolument à l’avenir, il faut reconnaître que les attentes qui ont été soulevées à l’époque ne sont pas encore satisfaites et que, bien que nous nous dirigions vers cet objectif, nous sommes encore loin de l’atteindre. Et notamment, au cours des 25 dernières années, les circonstances géopolitiques qui définissaient la région euro-méditerranéenne en 1995 ont beaucoup changé, pas toujours dans la meilleure direction.
Aujourd’hui, la situation est beaucoup plus complexe et plus difficile à gérer, avec divers conflits et tensions qui se chevauchent et s’alimentent, avec des déséquilibres économiques et sociaux croissants, et avec des fractures culturelles inquiétantes qui menacent de mettre en péril l’essence même de notre projet euro-méditerranéen commun.
À tout cela s’ajoute une urgence sanitaire exceptionnelle qui vient souligner le caractère unique de la zone euro-méditerranéenne et l’importance du voisinage géographique immédiat. Dans ces circonstances, nous ne pouvons pas nous laisser décourager. Il faut plus que jamais développer ensemble une politique euro-méditerranéenne renouvelée et active, adaptée aux défis et opportunités actuels, visant à terme à faire de la Méditerranée un espace ouvert et de dialogue, avec un véritable projet de coopération et d’intégration entre les deux rives, ce qui permet de résoudre et de prévenir les conflits et les tensions.
Si nous ne suivons pas cette voie, nous trouverons tôt ou tard le théâtre d’une Méditerranée de plus en plus instable et imprévisible, transformée en une ligne fracturant des mondes de plus en plus égocentriques et distants les uns des autres.
Je suis heureux de savoir que le Forum Régional de l’Union pour la Méditerranée en novembre 2020, ainsi que la réunion également organisée par les Ministres des Affaires étrangères des pays de l’UE et du voisinage sud, se sont tenus avec la ferme intention d’empêcher que ce scénario ne devienne réalité.
Dans ces circonstances compliquées auxquelles j’ai fait référence, des opinions sont parfois exprimées qui dénotent une certaine fatigue, proche du désintérêt, par rapport à ce projet. L’anniversaire que nous avons célébré représente une excellente occasion d’élever nos voix à l’unisson et de proclamer que, si nous avons réussi en 1995, nous réussirons également maintenant. L’expérience ou les connaissances ne manquent pas. Les outils existent, ainsi que la volonté politique de les mettre à jour afin de libérer leur plein potentiel. Aujourd’hui comme hier, la clé réside dans la coresponsabilité et la clarté des objectifs.
(Transcription éditée par le Secrétariat de l’UpM. Texte original en espagnol de l’intervention de Sa Majesté le Roi d’Espagne à l’occasion de l’inauguration du 5e Forum Régional de l’Union pour la Méditerranée – 27 novembre 2020)